Manuel Valls a plaidé mardi pour un renforcement de tous les territoires et une carte administrative qui tienne compte des « spécificités locales », en présentant la réforme territoriale au Sénat.
Le premier texte sur la réforme territoriale, qui concerne essentiellement la carte des Régions, avait été retoqué en première lecture au Sénat avant le renouvellement sénatorial de septembre. La majorité y était alors de gauche. L'Assemblée nationale s'était ensuite prononcée pour une France métropolitaine de 13 Régions.
« Le premier objectif de cette réforme, c'est de renforcer tous les territoires : de doter les plus dynamiques des compétences nécessaires pour poursuivre leur développement économique; mais tout en veillant à ce que les territoires fragilisés ne soient ni abandonnés à leur sort, ni privés de chances de développement », a-t-il assuré.
Le second, c'est « la clarification » : « clarté, efficacité, baisse de la dépense publique, proximité, voilà ce que nos concitoyens attendent de leurs institutions », a lancé le Premier ministre.
« Un territoire rural ne fait face ni aux mêmes réalités, ni aux mêmes défis qu'une métropole »
« La carte administrative de la France doit tenir compte des spécificités locales. C'est du bon sens ! », a-t-il souligné, relevant qu'« un territoire rural, par exemple, ne fait face ni aux mêmes réalités, ni aux mêmes défis qu'une métropole ».
« C'est pourquoi je me suis engagé auprès des élus de la montagne, des élus des territoires ruraux, à adapter la réforme territoriale aux spécificités de leur territoire », a-t-il dit. Il s'est aussi déclaré « favorable à de nouveaux transferts de compétences de l'Etat vers les Régions en matière de développement économique, et à l'expérimentation en matière d'accompagnement vers l'emploi. »
La carte des Régions « votée à l'Assemblée nationale a le mérite de la clarté », a-t-il aussi affirmé, alors que le Sénat devait examiner cette carte dans la soirée. Le Sénat a modifié la carte de l'Assemblée, qui s'était prononcée pour 13 Régions, en en proposant 15 (l'Alsace à part et le Midi-Pyrénées et le Languedoc-Roussillon séparés). Depuis, les sénateurs socialistes ont déposé un amendement séparant également le Nord-Pas-de-Calais de la Somme.
« Nous devons approfondir le processus intercommunal, et penser les politiques à l'échelle des bassins de vie », a-t-il aussi assuré. A cet égard, il a estimé qu'il faudra adapter le seuil de 20.000 habitants pour les intercommunalités.
« Le cadre départemental pourra évoluer » après 2020, quand « les Régions se seront appropriées leurs nouvelles compétences, les intercommunalités structureront plus encore qu'aujourd'hui les territoires », a-t-il prévu.
« Nous avons donc cinq ans pour préparer sereinement les évolutions », a-t-il dit.
Avant la fin de l'année un deuxième texte au Sénat
Enfin, répondant à une préoccupation des maires, M. Valls a assuré, sous les applaudissements des sénateurs, que les aides de l'Etat pour la mise en place de la réforme des rythmes scolaires seraient « maintenues » à leur « niveau actuel ».
« Aujourd'hui, la deuxième lecture offre au Sénat la possibilité de jouer pleinement son rôle de législateur », a-t-il par ailleurs plaidé.
Le gouvernement doit présenter au Sénat avant la fin de l'année un deuxième texte sur la réforme territoriale, portant cette fois sur les compétences.
« Cette réforme tourne le dos à l'esprit même de la décentralisation, sur la route tortueuse de la confusion », a répondu à M. Valls Bruno Retailleau, président des sénateurs de l'UMP. En revanche, a-t-il estimé, « le Sénat va enfin discuter d'un texte, élaboré par la majorité de droite, qui soutient une idée forte de grandes Régions au service des départements ».
« A l'issue de votre intervention, je ne suis pas certain d'être sorti du brouillard », a déclaré le chef du groupe centriste François Zocchetto.
« Ce texte est mortifère pour le département qui est le mien », a jugé Jacques Mézard au nom du RDSE (à majorité PRG). « Pour cela, je continuerai à combattre votre projet », a-t-il ajouté. Le PRG avait menacé de quitter le gouvernement en exigeant le maintien des départements ruraux.
« Cette réforme porte en germe l'éclatement de l'unité républicaine », a estimé pour le CRC (Communiste, républicain et citoyen) Eliane Assassi.
Pour le patron des sénateurs du PS, Didier Guillaume, « cette réforme repose sur l'intelligence des élus locaux, sur l'intelligence des territoires ». « Je pense que nous pouvons nous retrouver, nous l'ensemble des sénateurs, sur un socle territorial commun », a-t-il lancé.
Quant au groupe écologiste, il « soutiendra une réforme audacieuse, mais pas une réforme qui resterait au milieu du gué », a assuré Ronan Dantec.