La chambre sociale de la cour d'appel de Bordeaux a condamné jeudi l'assurance accidents des exploitants agricoles (Aaexa) à indemniser un agriculteur charentais gravement intoxiqué en 2004 par un herbicide de Monsanto, le Lasso.
« La cour d'appel a confirmé la décision de première instance, condamnant l'assureur à prendre en charge l'accident et la rechute de mon client au titre de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles », a indiqué l'avocat de l'agriculteur, Me François Lafforgue.
Selon l'avocat, la juridiction bordelaise « a établi le lien de causalité entre les troubles et l'herbicide produit par Monsanto », ajoutant que c'était « une première en France devant une cour d'appel ».
En première instance, en novembre 2008, Paul François, un agriculteur de Bernac (Charente) âgé de 45 ans, avait obtenu auprès du tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass) d'Angoulême la reconnaissance d'un lien entre la pathologie dont il souffre et son intoxication.
L'assurance accidents des exploitants agricoles, qui n'avait pas voulu prendre en charge la rechute de l'agriculteur après une première hospitalisation, avait fait appel de cette décision.
M. François avait été intoxiqué en avril 2004 en manipulant du Lasso, un herbicide fabriqué par le groupe américain Monsanto contenant notamment un solvant nocif, le chlorobenzène, et dont la vente est interdite en France depuis 2007.
L'agriculteur, à la tête d'une exploitation céréalière de 240 hectares, avait inhalé ce produit alors qu'il nettoyait la cuve du pulvérisateur ayant contenu le produit.
Depuis cette intoxication, l'agriculteur souffre de violents malaises, de vertiges, de moments d'absence ou de pertes de connaissance, avait indiqué son avocat lors de l'audience devant la cour d'appel, le 10 décembre dernier.
« C'est une grande victoire après quatre années de procédure. C'est important pour moi, c'est aussi important pour les autres agriculteurs qui ont été comme moi intoxiqués », a indiqué jeudi M. François, affirmant qu'il avait été contacté par « des dizaines de victimes et de famille de victimes ». L'exploitant agricole est toujours en « arrêt de maladie ».
D'autre part, Me Lafforgue a souligné qu'il avait engagé devant le tribunal de grande instance de Lyon une action contre la firme Monsanto pour « faute » sur « le manque de renseignements sur la dangerosité du produit ».
« La décision de Bordeaux est une étape importante », a indiqué l'avocat parisien, ajoutant qu'« il reste à caractériser la responsabilité de Monsanto dans la vente de ce produit qui avait déjà été interdit avant 2007 dans d'autres pays que la France ».
Une première audience de mise en état du dossier s'est tenue à Lyon le 26 janvier 2010, la prochaine a été fixée au 27 avril 2010.