La Commission européenne s'est dite prête lundi à réexaminer un volet de sa proposition de réforme de la Pac, celui de la réduction des subventions les plus élevées, qui mécontente plusieurs pays, à commencer par l'Allemagne.
«Je pense que nous allons examiner cela. Si (le projet à l'étude) a seulement pour résultat de morceler les exploitations, alors nous devrons réexaminer nos idées», a déclaré la commissaire à l'Agriculture Mariann Fischer Boel avant une réunion à Bruxelles des ministres européens de l'Agriculture.
Dans le «bilan de santé» de la Pac publié la semaine dernière, la Commission suggère de baisser les subventions les plus élevées versées dans l'Union européenne.
Une telle mesure concernerait principalement deux pays concentrant les aides dépassant 100.000 euros: l'Allemagne, où le démantèlement des coopératives agricoles de l'ex-RDA a donné le jour à de très grandes exploitations, et le Royaume-Uni où plusieurs membres de la famille royale comptent parmi les grands bénéficiaires de la Pac.
Certains opposants à cette proposition ont fait valoir qu'elle risquait simplement de pousser les grandes exploitations à se morceler en plus petites unités dans le seul but d'éviter la réduction des aides.
L'Allemagne, première contributrice du budget de l'UE, a réaffirmé lundi par la voix de son ministre de l'Agriculture, Horst Seehofer, son opposition à un tel plafonnement.
«Il n'est pas possible qu'une modification de la politique agricole se fasse principalement aux dépens des exploitations de l'est de l'Allemagne» qui, selon la proposition de la Commission, «devraient supporter presque la moitié des économies envisagées dans l'ensemble de l'Europe», a-t-il dit.
Bruxelles propose plusieurs autres pistes de révision de la Pac: généralisation du découplage des aides, révision du système d'intervention dans le secteur des céréales, fin de la jachère et des quotas laitiers.
Certains aspects du «bilan de santé» suscitent de fortes réserves en France, première puissance agricole européenne et principale bénéficiaire de la Pac.
«L'important, c'est que nous devons garder une grande politique alimentaire pour l'Europe», a dit à son arrivée à Bruxelles le ministre français de l'Agriculture Michel Barnier.
Il s'est montré «réservé» sur la disparition des quotas laitiers, qui pourrait favoriser la concentration de la production laitière dans certaines régions, aux dépens d'autres plus fragiles. «Je n'ai pas envie que toutes les Alpes et les Pyrénées soient vidées de production laitière», a-t-il dit, en invitant à ne «pas baisser la garde de la Pac» et à continuer «à soutenir la production».
Les propositions de Bruxelles n'ont toutefois pas que des opposants. La ministre espagnole Elena Espinosa s'est dite disposée à mener «un grand débat» de fond sur la Pac. Son collègue autrichien, Josef Pröll, a lui aussi affirmé être «prêt» à réfléchir «à un nombre limité de mesures» d'adaptation, «mais certainement pas à une réforme totale».