Les Etats-Unis et l'Inde ont résolu leur différend sur les subventions agricoles indiennes. Il s'agit d'une avancée cruciale en vue de la mise en œuvre de l'accord commercial historique de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) conclu à Bali en décembre 2013, saluée comme telle par le directeur général de l'OMC, Roberto Azevedo.
New Delhi avait torpillé en juillet 2014 la conclusion d'un Accord de facilitation des échanges (TFA) destiné à réduire les barrières douanières, exigeant que ses réserves alimentaires ne soient pas soumises à de possibles sanctions de la part de l'OMC. La constitution de réserves alimentaires subventionnées pour les pauvres est considérée comme une infraction en vertu des règlements de l'OMC.
La résolution du différend entre les deux pays devrait, selon eux, permettre la mise en œuvre de cet Accord de facilitation des échanges, disposition essentielle du texte conclu à Bali en décembre 2013 lors de la dernière conférence ministérielle des 160 Etats membres de l'organisation.
Jeudi, les Etats-Unis et l'Inde sont convenus que les programmes de sécurité alimentaire indiens ne seraient pas remis en cause par l'OMC « jusqu'à ce qu'une solution permanente sur le sujet soit trouvée et adoptée », selon un communiqué officiel américain. La Maison Blanche a estimé que cet accord « ouvrait la voie à des progrès en vue de la mise en œuvre immédiate et complète de l'Accord de facilitation des échanges, qui va abaisser les coûts des échanges pour les pays développés et en développement ».
L'Inde a déclaré de son côté être « extrêmement heureuse » que les deux pays aient « résolu leur différend sur la question des stockages publics en vue d'assurer la sécurité alimentaire ». « Cela met fin à l'impasse au blocage de l'OMC et ouvre la voie à l'Accord de facilitation des échanges », a estimé la ministre du commerce, Nirmala Sitharaman, dans un communiqué. « Le Conseil général de l'OMC va recevoir la proposition de l'Inde et les Etats-Unis la soutiendront », a souligné la ministre indienne. « Nous sommes confiants que le sujet va être abordé de manière constructive dans le cadre de l'OMC », a-t-elle poursuivi.
« L'Inde n'était pas isolée »
Le directeur général de l'OMC, Roberto Azevedo, tentait depuis plusieurs semaines de sauver l'accord sur le TFA qui doit, selon lui, simplifier les procédures douanières et générer des milliards de dollars d'économies et de bénéfices mutuels chaque année. Il avait reconnu la semaine passée que le blocage sur les stocks alimentaires « avait paralysé les négociations multilatérales au sein de l'organisation », estimant qu'il s'agissait « de la plus grave crise que connaissait l'OMC » depuis sa création.
Le Premier ministre indien Narendra Modi avait évoqué le sujet avec le président Barack Obama lors de sa visite à Washington en septembre, relançant les espoirs d'une percée. Certains pays occidentaux, emmenés par les Etats-Unis, craignaient que les réserves alimentaires subventionnées ne finissent sur les marchés, constituant une distorsion des règles du commerce.
La totalité des 160 membres de l'OMC, y compris l'Inde, avaient accepté la mise en œuvre du TFA, considéré comme le plus important accord mondial de libéralisation du commerce de ces vingt dernières années, lors d'une conférence ministérielle à Bali en décembre 2013. Mais l'Inde a pris ses partenaires par surprise en juillet en refusant de le signer. L'Inde avait indiqué à ce moment-là vouloir négocier tout de suite une clause sur sa souveraineté alimentaire, et non pas attendre 2017, comme décidé à Bali.
L'inde estime que la constitution de stocks alimentaires est essentielle pour assurer aux paysans pauvres et aux consommateurs de pouvoir survivre dans un environnement commercial mondial impitoyable. « De nombreux pays ont reconnu l'intérêt de ce que nous demandions », a dit la ministre Sitharaman jeudi. « L'Inde n'était ni seule ni isolée. Simplement les autres ne s'exprimaient pas ouvertement. »
Le représentant américain au Commerce, Michael Froman, s'est dit impatient de travailler avec les membres de l'OMC « pour atteindre un consensus sur la mise en œuvre du Paquet de Bali, dont le TFA ». L'adoption du protocole sur la facilitation du commerce devait intervenir le 31 juillet dernier, pour une entrée en vigueur du TFA à la mi-2015.