Les producteurs laitiers du grand Ouest accueillent avec scepticisme la hausse de 2% des quotas laitiers, votée lundi parle Conseil des ministres de l'UE.
«Est-ce que 2% est le bon niveau, s'interroge Jean Turmel, président de la section laitoère de la FRSEA Normandie? Nous ne le savons pas. Nous aurions bien voulu qu'il y ait des évaluations pour savoir comment évolue exactement le marché.» Le syndicaliste redoute qu'il arrive trop de marchandises et que les volumes supplémentaires contribuent à détériorer les cours des produits laitiers.
«Il aurait été plus judicieux d'augmenter de 1% cette année, puis de 1% à nouveau l'an prochain, après avoir vérifié que la première hausse n'a pas entraîné de retournement à la baisse des prix», estime Marcel Denieul, président de la section laitière de la FRSEA de l'Ouest (FRSEAO, qui comprend la Bretagne, la Basse-Normandie et les Pays de la Loire). Pour lui, le niveau actuel du cours des produits laitiers est bon, «mais la demande n'est pas extensible. Le prix de la poudre de lait, par exemple, a baissé récemment. Cela devrait inciter à la prudence.»
«Nous n'avons pas le sentiment que les décisions de la Commission européenne sont prises en fonction des marchés, mais plutôt dans une logique de sortie de quotas, indique André Souteyrat, chef du service de veille, études et prospectives, à la chambre d'agriculture de Bretagne. Nous voudrions que les décisions s'appuient sur une base objective. Sinon, on court le risque de déstabiliser les marchés laitiers.»
La Coordination rurale (CR) et sa section laitière, l'Organisation des producteurs de lait (OPL), protestent également contre le vote du Conseil des ministres. Pour elles, «l'Europe persiste dans l'erreur». «Cette décision constitue malheureusement le premier acte du mauvais scénario conçu par la Commission pour obtenir la baisse du prix du lait en organisant la surproduction», estiment les deux organisations dans un communiqué.
«L’OPL et la CR s’étonnent de l’abstention de la France, qui aurait pu et dû défendre la même position que l’Allemagne.» Cette dernière a voté contre la hausse de quota, alors que l'Hexagone s'est abstenu.
La stratégie de la Commission comporte «deux erreurs grossières que la France aurait dû dénoncer: premièrement, le manque de lait n’est pas dû à une insuffisance des quotas mais à leur sous-réalisation; deuxièmement, c’est parce que le prix du lait n’a pas cessé de diminuer que beaucoup de producteurs ont fini par abandonner la production».
L’OPL et la CR attendent «que se mette enfin en place une vraie politique de stabilisation de la production et du marché du lait en Europe», et réclament une «gestion souple et adaptée des quotas permettant la maîtrise de la production et l’adéquation de l’offre à la demande». Les deux syndicats estiment que «la Commission doit rompre avec son obsession de la libéralisation de la production de lait pour satisfaire une "soi-disant" vocation exportatrice».