Les assureurs, pour appréhender au mieux les dégâts que peuvent causer les événements climatiques extrêmes sur le maïs ou la vigne, en Mongolie ou au Mali, s'emploient à créer des modèles reflétant au plus près les pertes réelles sans avoir à les constater de visu.
Le travail de collecte, de traitement et d'analyse des données météorologiques est essentiel pour développer l'assurance « indicielle » ou « paramétrique » qui permet aux agriculteurs de se protéger à moindre prix, aussi bien dans les pays émergents que dans les pays développés. Les informations sont récupérées via divers instruments, explique à l'AFP Henri Douche, responsable d'une équipe de modélisation des risques agricoles regroupant agronomes et mathématiciens chez le réassureur Scor.
Utilisées depuis longtemps, les stations météorologiques au sol rassemblent des données sur le niveau de précipitations ou de températures. Les satellites météo, stationnés à 36.000 kilomètres au-dessus de la Terre, apportent des informations fiables et constantes sur l'ensemble des territoires. Les satellites en basse altitude, qui peuvent faire un tour de la planète en 100 minutes à 800 kilomètres de hauteur, prennent diverses images de la végétation.
Une résolution de 0,50 mètre
En utilisant des algorithmes qui permettent par exemple de calculer l'évapotranspiration du sol ou les radiations des plantes, « on peut capturer par images satellitaires la production de biomasse, et de là savoir si une récole est bonne ou mauvaise », souligne Tanguy Touffut, directeur du département d'assurance paramétrique chez Axa. La résolution des satellites, actuellement de l'ordre de 200 à 250 mètres, « atteindra bientôt jusqu'à 50 centimètres » avec les derniers appareils lancés dans l'espace, note-t-il.
Pour établir quand la météo est vraiment préjudiciable aux paysans, les informations recueillies sont à mettre en perspective avec les données du passé. « Aujourd'hui, on a accès à 10 à 12 ans d'imageries satellites sur toute la planète », remarque Henri Douche. Ces données « servent à définir un niveau normal de production qu'on suit ensuite tous les ans. Si on est en dessous de la franchise, cela déclenche l'indemnisation de l'agriculteur. »
Des « modèles de plantes »
Son équipe développe aussi des « modèles de plantes » qui simulent toutes les étapes de leur croissance. Si des températures extrêmes sévissent juste quelques jours, mais au moment crucial de la floraison, les assureurs peuvent ainsi les relier à une réelle perte de rendement. Cette technique aide aussi à la simulation de scénarios intégrant des éléments inédits liés au changement climatique, ou à l'adoption de nouvelles variétés de plantes, de systèmes d'irrigation, etc.
Un exercice d'autant plus nécessaire que l'évolution du climat conduit à des phénomènes « pas du tout intuitifs », à l'image de certains pays d'Afrique de l'Ouest, où les cultivateurs de coton ne redoutent plus tant la sécheresse que l'excès d'eau en fin de saison, remarque Tanguy Touffut.