La Fédération nationale des producteurs de l'horticulture et des pépinières (FNPHP) s'est alarmée le 8 avril 2015 d'une décision de l'Office européen des brevets (OEB), dans laquelle elle voit une « appropriation inacceptable » de la nature.
La FNPHP a dans le viseur une décision de la Grande chambre des recours de l'OEB du 25 mars, affirmant qu'un « produit obtenu par un procédé essentiellement biologique est brevetable ». « Cette conclusion ne fait que renforcer la pratique actuelle en matière de brevets sur les plantes en Europe », écrit la Fédération dans un communiqué.
« Des caractères naturels isolés, et qui obtiendront une protection par brevets, obligeront toutes les entreprises produisant des variétés présentant ces mêmes caractéristiques (naturelles, rappelons-le) à obtenir un droit à produire et devront acquitter une licence », s'insurgent les horticulteurs, s'alarmant d'un danger mortel pour toute la filière.
« Seules les entreprises suffisamment armées financièrement pourront protéger "en masse" bon nombre de caractères naturels et ainsi s'approprier des biens naturels, jusqu'alors propriété de tous, producteurs comme consommateurs », poursuivent-ils, jugeant qu'« une solution politique semble plus que jamais importante ».
Tomate et brocoli
En décembre 2010, la plus haute juridiction de l'OEB avait jugé que les méthodes de culture « essentiellement biologiques », c'est-à-dire fondées sur des méthodes comme la sélection et le croisement, n'étaient pas brevetables.
Dans deux dossiers de demande de brevets liés à la production de tomates et de brocolis, la Grande chambre de recours était cette fois appelée à déterminer si, selon la loi européenne, les produits de ces méthodes « essentiellement biologiques » étaient brevetables.
En se basant sur la convention européenne des brevets et sur la directive sur les biotechnologies de 1998, ainsi que sur les contributions adressées par la société civile, la juridiction a estimé que ces produits n'étaient pas exclus du domaine de la brevetabilité, mais qu'ils restaient soumis aux critères habituels, notamment l'interdiction de breveter une variété.
Interrogé par l'AFP, un porte-parole a affirmé que l'OEB ne s'était pas prononcé sur l'opportunité ou pas de breveter ces produits, tâche qui revient au législateur, mais sur « la façon dont la loi européenne fonctionne ».
Le porte-parole a par ailleurs estimé que « la décision a souligné l'importance d'un examen approfondi » de toutes les demandes de brevets. « Chaque cas est examiné individuellement. Le taux de délivrance pour les biotechnologies est de moins de 30 %, alors qu'il est de 50 % en général », a-t-il insisté.