Les biocarburants ne doivent pas se développer au détriment des cultures destinées à l'alimentation, a mis en garde samedi le vice-président de la Commission européenne, Günter Verheugen.
«Il ne peut pas être raisonnable de fabriquer du carburant pour les voitures à partir de plantes devant servir à l'alimentation humaine et animale», a-t-il affirmé au journal Bild am Sonntag (édition de dimanche).
«Je me félicite que l'heure ne soit plus à l'euphorie à propos des biocarburants», a ajouté le commissaire allemand, qui s'est prononcé pour que la recherche mette l'accent sur les biocarburants dits de seconde génération, «par exemple dans les technologies de l'hydrogène».
«Ce qui compte pour la Commission, c'est le développement durable. Si la production de denrées alimentaires est entravée, ou si la forêt tropicale est abattue (du fait des biocarburants), ça ne fonctionne pas du tout.»
«Si les biocarburants entraînent un bilan environnemental négatif, on fait fausse route. Nous devrions y regarder à deux fois avant de miser sur les biocarburants de manière inconditionnelle», a encore déclaré le commissaire.
Les pays de l'UE se sont fixés au début de 2007 un objectif d'utiliser 10% de biocarburants dans leur consommation totale de carburants d'ici à 2020, une ambition de plus en plus contestée face à l'envolée des prix et les récentes émeutes de la faim.
Ils n'ont pas pour l'instant remis formellement en cause cet objectif, mais pour désamorcer les critiques ils essaient de sélectionner des critères environnementaux et sociaux stricts pour utiliser les biocarburants à l'avenir.
Le développement des biocarburants s'inscrit dans un plan plus vaste de l'UE pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, de 20% avant 2020, ainsi que sa dépendance vis-à-vis de l'énergie fossile.
L'industrie des biocarburants craint pour sa part que le débat actuel ne freine les recherches de pointe sur les biocarburants de deuxième génération, plus verts car fabriqués à partir de déchets agricoles non alimentaires comme la paille.
Le sujet a églement été abordé lors du cinquième sommet entre l'UE et l'Amérique latine qui s'est achevé vendredi soir à Lima.
Le président brésilien, Luiz Inácio Lula da Silva, dont le pays est le deuxième producteur de biocarburants après les Etats-Unis, grâce à l'éthanol issu de la canne à sucre, a défendu leur utilisation, y compris dans le contexte de cette crise alimentaire mondiale.
Le chef du gouvernement espagnol, José Luís Rodrigues Zapatero, s'est efforcé de calmer le débat, assurant que c'était encore prématuré: «Je crois que c'est encore un peu tôt pour entamer le débat sur l'impact (des biocarburants) sur la hausse des prix des aliments, compte tenu du fait qu'il y a aussi de nombreux types de biocarburants», a-t-il expliqué devant la presse.
A la clôture du sommet, la présidente chilienne Michelle Bachelet et son homologue argentine Cristina Kirchner ont proposé une alliance entre l'Amérique latine et l'Union européenne pour affronter la crise alimentaire mondiale.
L'Europe, très préoccupée par les conséquences du réchauffement climatique, défend l'utilisation de ces biocarburants que certains pays latino-américains, dont la Bolivie ou le Venezuela, rejettent totalement.