Quatre mondes agricoles différents sont appelés à cohabiter en France d'ici à 2030, en fonction de l'exode rural et de l'évolution des prix de l'énergie, a estimé jeudi l'Inra.
«Ces différents scénarios cohabitent déjà en France et ailleurs dans le monde. Ils vont nécessiter des changements des pratiques agricoles», a déclaré Guy Riba, directeur général délégué de l'Inra, lors d'une conférence de presse.
L'Inra, qui refuse de prévoir un scénario dominant en 2030 parmi les quatre, «devra s'organiser autrement, nouer des alliances dans le monde pour se préparer à ces changements», a-t-il ajouté.
Selon le premier scénario, les espaces ruraux vont fortement se réduire en 2030 sous l'effet d'une périurbanisation très poussée.
L'Inra donne l'exemple de la région Midi-Pyrénées, dont la population va s'accroître de 700.000 habitants d'ici à 2030, particulièrement à Toulouse. Les espaces agricoles y seront «déstructurés»: les agriculteurs vont vendre leurs fermes faute de relève chez les jeunes, attirés par la ville.
Dans le deuxième scénario, la population vit à la campagne mais travaille en ville, comme on le constate déjà en périphérie de la région parisienne.
L'agriculture de qualité survit dans ce scénario, puisque les consommateurs recherchent «des espaces de vie qui ont gardé un certain cachet du point de vue des paysages, des modes de vie, des produits typés» (c'est-à-dire bio ou AOC), selon l'Inra.
En Provence-Alpes-Côte d'Azur, le troisième scénario est à prévoir, fondé sur un changement radical lié à l'augmentation du prix du pétrole qui va limiter les déplacements de la population, selon l'Inra.
Dans ce contexte, les villes vont s'étaler en hauteur (gratte-ciel) dans un souci d'économie des frais de transport. En PACA, en 2030, une agriculture intra-urbaine va se développer, avec des fermes et des élevages à Marseille, Aix ou Avignon.
«Cette situation est déjà très développée en Asie, mais le risque d'épidémie est plus grand. Nous l'avons constaté avec la grippe aviaire», a souligné M. Riba.
Quatrième scénario: une ville moyenne toutes les 30 à 40 kilomètres proposant des services complets (écoles, hôpital, cinéma, internet). La Manche en 2030 sera ainsi «un département consolidé autour d'un réseau de petites villes et de bourgs» et une population stable depuis 2000.
Du côté de l'agriculture, «les coopératives agroalimentaires qui s'étaient structurées autour de filières fromagères, en appellation d'origine surtout présentes sur un marché mondialisé [...], ont su permettre le maintien des exploitants agricoles» dans la Manche, prévoit l'Inra.