Une étude scientifique française suggère que « l'intensification agricole affecte négativement les pollinisateurs et le service de pollinisation qu'ils fournissent ».
Suite à une étude menée sur 54 cultures en France de 1989 à 2010, des chercheurs du CESCO (Muséum national d'Histoire naturelle/CNRS/UPMC), de l'Université d'Orléans et de l'Inra ont publié leurs résultats sur l'importance des insectes pollinisateurs pour les terres agricoles métropolitaines dans la revue Frontiers in Ecology and the Environment.
En s'interrogeant sur les impacts de l'agriculture intensive, les scientifiques ont constaté que « l'intensification de l'agriculture est de moins en moins efficace pour améliorer la productivité des cultures à mesure que celles-ci sont de plus en plus dépendantes des pollinisateurs », résume le CNRS dans un communiqué. « En particulier, cette intensification ne permet pas d'augmenter le rendement, voire occasionne plus de variabilité, pour les cultures hautement dépendantes du service de pollinisation. Cela suggère fortement que l'intensification agricole affecte négativement les pollinisateurs et le service de pollinisation qu'ils fournissent. »
L'intensité de l'agriculture a été estimée au niveau régional en tenant compte du système de rotation des cultures, des quantités d'intrants utilisées (irrigation, engrais, pesticides) et de la présence d'habitats semi-naturels dans le paysage (par exemple haies ou forêts). « Comme attendu, les résultats montrent que le rendement moyen des cultures peu ou non dépendantes du service de pollinisation augmente avec l'intensité de l'agriculture, et que la variabilité du rendement diminue. Cependant, ces gains s'amenuisent pour les cultures plus dépendantes du service de pollinisation. Pour les cultures très dépendantes en pollinisateurs (65 % - 95 %), le rendement moyen n'augmente d'ailleurs pas avec les pratiques agricoles plus intensives et une plus forte variabilité du rendement moyen est observée. »
« Ainsi, les résultats de cette étude révèlent l'impact négatif de l'intensification sur les pollinisateurs et les services qu'ils rendent, ce qui en conséquence limite la productivité des systèmes agricoles. L'enjeu est désormais de développer de nouvelles approches agricoles permettant de maximiser les rendements en se reposant sur les services éco-systémiques fournis par la biodiversité, tels que la pollinisation ou le contrôle des ravageurs des cultures ; un enjeu majeur limitant ainsi les impacts de l'agriculture sur la nature », fait valoir le CNRS.
Nicolas Deguines1, Clémentine Jono1, Mathilde Baude2,3, Mickaël Henry4,5, Romain Julliard1, Colin Fontaine1
(1) UMR 7204 MNHN-CNRS-UPMC, CESCO, Paris, France ; (2) School of Biological Sciences, University of Bristol, Bristol, UK ; (3) Université Orléans, EA 1207, Orléans, France ; (4) Inra, UR406 Abeilles et Environnement, Avignon, France ; (5) UMT PrAdE, Avignon, France