Publié le jeudi 21 mars 2013 - 19h14
En clôture du congrès de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), le 21 mars 2013 à Nantes (Loire-Atlantique), Thierry Roquefeuil, dans son premier discours de président, a rappelé au ministre de l'Agriculture les difficultés auxquelles l'élevage laitier est aujourd'hui confronté, appelant Stéphane Le Foll à « détailler et expliquer » le plan exceptionnel pour l'élevage, présenté en conseil des ministres le 6 mars.
Dans sa réponse, le ministre de l'Agriculture a énuméré différents appuis décidés pour la filière laitière :
• Pour 2013, une enveloppe de 20 millions d'euros (issus de l'enveloppe des aides couplées) sera affectée aux récents installés et aux récents investisseurs (la même somme sera attribuée à la filière des bovins allaitants, et 4 M€ à la filière laitière caprine).
• Dans la contractualisation, la protection des jeunes installés sera améliorée grâce à une durée du contrat plus longue et une possibilité de résiliation unilatérale à leur bénéfice.
• Le ministère veillera aussi au rééquilibrage des clauses de sauvegarde en faveur des producteurs. Il devrait ainsi être possible de revoir les modalités de calcul du prix du lait lors de forte hausse des coûts de production. Ce point sera élaboré en parallèle avec les modifications de la LME.
• Renforcer le pouvoir des OP pour renforcer leur capacité de négociation. Le ministère réfléchira aux moyens à mettre en œuvre pour les y aider.
• Pour les coopératives : les pouvoirs publics veilleront à ce que l'application de la contractualisation réponde aux exigences de la loi.
• Quant à l'aide couplée à la vache laitière, réclamée par la FNPL, la réponse du ministre est suspendue au taux de couplage des aides, qui fixera le budget disponible pour l'ensemble des aides couplées.
Stéphane Le Foll a aussi abordé le thème des relations commerciales. Il s'est engagé à organiser « rapidement » une table-ronde sur le sujet, réunissant l'ensemble de la filière, comme le demandait la FNPL. Il a aussi rappelé les assouplissements actés par les ministres de l'Agriculture de l'UE, négociés au début de la semaine à Bruxelles. Il a annoncé l'organisation d'une table-ronde par Dacian Ciolos sur la nécessaire régulation de la production laitière européenne après 2015.
En attendant, la FNPL et la FNSEA, par la voix de Xavier Beulin, annoncent que les mobilisations sur le thème de l'élevage vont se poursuivre dans les prochains jours, d'abord dans les régions, puis au niveau national, en prenant à témoin l'opinion publique.
Lait : un prix annuel de 328-330 €/1.000 l (estimations)
Le prix de base du lait devrait tourner autour de 328-330 €/1.000 l, en moyenne sur 2013, selon un représentant des industriels, qui s'appuie sur les indicateurs de marché publiés par l'interprofession laitière. Ce qui se traduirait par des prix de base autour de 292 €/1.000 l en avril et mai, de 332 € en juin et de 360 € en juillet-août.
Certains industriels, à l'instar de Bongrain, ont déjà annoncé des avances de trésorerie sur le premier semestre, remboursables sur les mois d'été, afin d'aider les producteurs. D'autres sont prêts à remettre en cause la saisonnalité, ce qui aboutirait finalement au même résultat, à savoir un lissage des prix sur le premier semestre.
« Pour avril et mai, ce serait bien de ne pas descendre en dessous de certains seuils, je veux parler des 300 €/1.000 l », soulignait un producteur lors du congrès de la FNPL. Un autre redoutait que certaines entreprises, malmenées par la crise, ne puissent pas atteindre les 360 € cet été.
LES RÉACTIONS PROFESSIONNELLES
Fnec : un geste « important » en attendant une hausse du prix du lait de chèvre
Selon la Fnec, le soutien de 4 millions d'euros à la filière annoncé par le ministre « est important pour les exploitations caprines qui sont aujourd'hui en très grande difficulté économique. La Fnec se félicite d'avoir été entendue par les pouvoirs publics mais continue d'œuvrer pour une hausse du prix du lait de chèvre significative dans les prochains mois. Cette hausse est vitale pour les exploitations caprines, dans un contexte d'augmentation sans précédent des coûts de production. »
Coordination rurale : « Les éleveurs méritent mieux qu'une aumône »
Pour la Coordination rurale (CR), « ce n'est pas par hasard que Stéphane Le Foll a choisi le congrès de la FNPL pour présenter son plan de soutien à l'élevage. Par le biais de ce choix peu glorieux, il était certain de trouver un public acquis qui n'entrevoit que la contractualisation comme solution et de maigres subventions pour repousser l'échéance ».
« Sans vouloir s'attaquer aux problèmes structurels de l'élevage, notre ministre use et abuse de toutes les ficelles de la communication : annonce d'une volonté de soutien, annonce d'un plan, annonce d'une enveloppe... A quand une mesure structurée et détaillée ? La filière de l'élevage ne peut plus se contenter d'effets d'annonce », déclare la CR.
Le syndicat « approuve la volonté du ministre d'encourager les installations et l'engraissement, mais quelles seront les conditions d'éligibilité ? Stéphane Le Foll ne présente pas non plus les détails des conditions d'octroi des aides accordées à ceux qu'il appelle les “récents investisseurs éleveurs de bovins allaitants et engraisseurs” ».
« Au vu de la situation économique des éleveurs et compte tenu du revenu agricole de 2012, un grand nombre d'exploitations ont cessé d'investir. En proposant une aide a posteriori, beaucoup d'éleveurs seront pénalisés. La filière de l'élevage est très mal en point, il faut cesser les soins palliatifs et appliquer des soins curatifs », explique la CR.
Confédération paysanne : un « début »...
La Confédération paysanne (CP) « voit enfin un début de prise en compte de ses propositions dans l'annonce faite [...] par le ministre de l'Agriculture. L'orientation des 44 millions d'aide va en effet dans le sens d'une redistribution plus efficace en direction des petites et moyennes fermes, ainsi que des jeunes installés. L'enveloppe reste cependant insuffisante et l'oubli des éleveurs d'ovins est incompréhensible », ajoute la CP dans un communiqué du 22 mars.
« Sur les 40 millions destinés aux éleveurs de bovins, le mode de distribution est globalement satisfaisant. En effet, l'abaissement du seuil [...], pour la partie engraissement, de 50 à 20 jeunes bovins, et le plafonnement, de fait, de l'aide à consommation de l'enveloppe, permet une redistribution plus équilibrée et moins discriminante pour l'ensemble des éleveurs. Il en est de même pour le plafonnement à 100.000 litres pour les laitiers. »
« Ces aides sont, par ailleurs, ciblées en direction des nouveaux installés et des récents investisseurs. Si le soutien aux jeunes nous apparaît indispensable, le ciblage sur les récents investisseurs porte le risque d'un financement de l'agrandissement et de la restructuration, ce qui ne va pas dans le sens de la pérennisation d'un modèle d'élevage à taille humaine. »
« Enfin, il est scandaleux d'oublier les éleveurs d'ovins, car c'est laisser les plus fragiles sur le bord de la route. Dans le secteur de l'élevage, ce sont eux qui ont les revenus les plus faibles. Il est grand temps de s'en préoccuper. »
« Pour réellement sauver l'élevage et ses éleveurs, une réorientation massive des aides est nécessaire. Nous attendons que le ministre de l'Agriculture œuvre dans ce sens lors des prochains arbitrages sur l'adoption de la réforme de la Pac. »
FRSEA/JA Bretagne : « Rien pour les élevages granivores »
« Pris en étau entre des prix qui baissent et des charges qui ne cessent d'augmenter, l'élevage breton est en danger », écrivent la FRSEA et les JA de Bretagne dans un communiqué du 22 mars.
« Que propose le gouvernement pour les éleveurs de porcs, de volailles, de lapins et les producteurs d'œufs ? Rien ! Hélas rien, alors que ces productions sont, à l'heure actuelle, les secteurs où l'emploi est d'ores et déjà en péril, à la fois dans les élevages mais aussi dans l'agroalimentaire. Pour preuve la situation des groupes Doux en volaille et GAD en viande porcine. Combien faudra-t-il encore d'arrêts d'élevage, de fermetures d'abattoirs, d'emplois perdus et de dépôts de bilan avant que le gouvernement n'entende les demandes du syndicalisme FRSEA/JA Bretagne ? »
« Au-delà des aides, tous les éleveurs ont besoin de prix rémunérateurs en adéquation avec les marchés. Nos revendications dans ce sens ne coûtent rien. Nous demandons juste un peu de courage politique et d'ambition pour assurer la compétitivité de nos élevages et des activités agroalimentaires qui en découlent. Aussi, nous demandons aux pouvoirs publics :
- d'informer le consommateur par l'affichage de l'origine nationale sur tous les produits alimentaires,
- d'être le garant de relations commerciales équilibrées permettant la répercussion des hausses de charges supportées par les producteurs,
- de mettre fin à la suradministration et à la pression normative qui découragent les éleveurs. »
A télécharger :
Elsa Casalegno
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