Marketing. « Pour les éléments visuels, nous avons fait confiance à nos filles. L’une est designer, l’autre travaille dans la communication », relate Francine. (photo de gauche)
Reconnaissance. Après dix ans de réflexion et l’obtention de la certification bio, la fromagerie est entrée en production au début de 2012. « Nous voulions avoir un retour complet sur notre produit », expliquent Francine et Patrick Mercier. (photo de droite)
L'EXPLOITATION |
A Champsecret (Orne) • Surface : 120 ha |
La cinquantaine leur a donné des ailes. A un moment de la vie où d'autres comptent les bougies, Francine et Patrick Mercier, éleveurs laitiers du bocage ornais à Champsecret, ont tout donné pour produire leur propre camembert.
« Cela faisait dix ans que nous avions ce projet en tête, raconte Francine. Nous avions l'intuition de bien travailler et nous avions à cœur d'avoir un retour complet sur notre produit. »
La renaissance s'est opérée sur deux fronts. La conversion à la production en agriculture biologique (AB) débute en 2010. « Un peu par accident, avoue Patrick. Les choix réalisés sur l'exploitation abandon du maïs et système tout herbe – nous rapprochaient tellement du cahier des charges, qu'il était dommage de ne pas franchir le pas. »
En parallèle, les éleveurs mettent sur pied leur projet de fromagerie. L'investissement s'élève à 410.000 euros. La production démarre dès le début de 2012, sitôt décroché le sésame de la certification AB. Francine et Patrick fabriquent alors, et encore à présent, le seul camembert certifié fermier, AOP (appellation d'origine protégée) et bio.
« Nous ne nous y attendions pas au départ, mais la certification AB nous a beaucoup aidés pour la vente, reconnaît Patrick. Nous avons développé une étiquette dédiée, mettant bien en avant le label. Nous avons créé un deuxième visuel pour les fromagers et épiceries fines, plus sensibles à nos autres signes distinctifs de qualité. »
Leurs filles, l'une designer et l'autre travaillant dans la communication, les ont énormément aidés dans l'élaboration de ces aspects marketing. « Nous avons réfléchi aux couleurs et nous avons choisi le vert, met en avant Francine. C'est peu habituel pour les fromages, mais cela ressort bien en rayon. Le vert évoque aussi le pâturage et l'alimentation tout herbe de nos vaches. Nous communiquons beaucoup grâce à notre site internet. Aujourd'hui, tout le monde est équipé d'un smartphone. »
Un libre-service
La vente des 450 camemberts fabriqués quotidiennement est totalement maîtrisée par les producteurs. Chaque jeudi, Patrick part pour une tournée de 350 km, afin de livrer les clients de la région. Les éleveurs accordent une importance particulière à ce marché de proximité, qui assure 30 % des ventes. Mais le potentiel local n'est pas suffisant.
« L'économie de notre fromagerie, qui compte trois salariés, nécessite de viser plus de volumes, assure Patrick. Nous réalisons ainsi 30 % de nos ventes via Rungis et encore 30 % auprès de professionnels français ou étrangers. Un magasin à la ferme écoule 10 % de notre production. Nous y avons adopté le principe du libre-service et nous faisons confiance aux clients, qui placent leur règlement dans la tirelire. Et cela fonctionne très bien. »
Le magasin est ouvert sur la fromagerie par deux grandes baies vitrées, qui donnent à voir le moulage et l'affinage des fromages. « Nous voulons offrir cette transparence à nos clients », insiste l'agriculteur.L'exploitation réalise depuis peu 10 % de ses ventes vers la Suisse et l'Allemagne. « Ceci, grâce aux étudiants de l'école de commerce de Saint-Lô, dans la Manche !, reconnaît Patrick.
Au départ ils devaient simplement prendre notre fromagerie comme support d'un travail pédagogique pour construire un business plan à l'exportation. Nous y avons cru. Nous leur avons payé une semaine sur place, embauché l'une d'elles en stage et c'est allé très vite. »
Le couple admet ne pas sortir la tête du guidon depuis deux ans. « Désormais, notre grand défi est de mettre en place une équipe salariée forte, souligne Francine. Nous pensons recruter une personne supplémentaire à la fromagerie. » La partie commerciale semble plus difficile à déléguer. « Pour un produit fermier comme le nôtre, les gens veulent voir le paysan », constate Patrick Mercier.
Un capital sympathie incroyable
« On veut répliquer la copie exacte de votre ferme en Russie. Combien voulez-vous pour accompagner le projet et nous donner la recette ? » Francine et Patrick Mercier ne comptent plus les demandes, un peu folles, de ce genre. « Le camembert et la Normandie ont une notoriété incroyable, constate Patrick.
A ces indications, nous sommes les seuls à ajouter les mentions fermier et bio et nous travaillons une recette originale des années cinquante. C'est explosif ! » Les éleveurs sont parfois un peu déroutés du rôle totémique qu'ils doivent endosser. Reste que la reconnaissance médiatique est là : « Il ne passe pas deux mois sans que vienne une télévision ! »
LES RÉSULTATS
• Evolution du chiffre d'affaires
• Production et prix moyen
450 camemberts par jour en 2014 (6 jours sur 7)
- Prix moyen de vente grossiste : 2,90 euros pièce
- Prix direct client à la ferme : 3,30 euros pièce
• Répartition des ventes
Camille Michel (publié le 6 février 2015)
Nos offres d'abonnement
simples ou couplées,
à nos publications
hebdomadaires
et mensuelles
Découvrir nos Offres