Le décryptage du génome de la truffe noire du Périgord est une avancée majeure dans la compréhension de la biologie du champignon le plus prestigieux. Un article sur le séquençage et le décryptage du génome de cette truffe a été publiée le 29 mars 2010 par l'Inra, le Genoscope, le CNRS, l'Université de Lorraine et l'Université de la Méditerranée.
Après cinq ans de recherche, cette avancée permet de mieux comprendre la biologie et la formation de ce champignon et l’évolution de la symbiose entre arbres et champignons. Le détail de ces résultats est publié dans l'édition avancée en ligne de la revue scientifique Nature du 28 mars 2010.
La truffe est le fruit du mariage entre des filaments souterrains de T. melanosporum et des ramifications de la racine de certains arbres, comme les chênes. De cette relation naissent des mycorhizes, organes symbiotiques mi-champignon, mi-racine. Le génome de la truffe, le plus grand connu chez les champignons, comprend 125 millions de paires de bases. Cette taille remarquable s’explique par la présence de séquences répétées (58 %) dont l’impact sur la diversité de l’espèce est en cours d’étude.
Le génome contient 7.500 gènes codant pour des protéines dont environ 6.000 sont similaires aux gènes d’autres champignons. Toutefois, plusieurs centaines de gènes sont uniques à la truffe et jouent un rôle fondamental dans la mise en place de la formation du champignon et de la symbiose avec la plante-hôte. Leur étude nous renseignera sur les mécanismes conduisant à la formation de cette étrange fructification souterraine.
Au-delà de son intérêt académique, le séquençage complet du génome de la truffe noire du Périgord a permis le développement d’outils de diagnostic à haut débit du polymorphisme génétique de ce produit réputé. En effet, depuis des siècles, de fortes variations dans les propriétés organoleptiques des truffes ont été constatées selon les régions de récolte (Périgord, Provence…), la nature des sols et le degré de maturité.
Le séquençage de l’ADN a permis d’identifier plusieurs milliers de marqueurs génétiques répartis sur tout le génome. Une dizaine est actuellement utilisée afin de constituer un fichier d’empreintes génétiques d’une cinquantaine de populations de Tuber melanosporum provenant de l’Italie, l’Espagne et la France.
Ce fichier d’empreintes génétiques facilite le « typage » des origines géographiques des truffes récoltées et permettra la mise en place d’outils de certification de ces produits et la détection d’éventuelles fraudes. En outre, la connaissance des mécanismes contrôlant la compatibilité sexuelle entre truffes devrait permettre une meilleure gestion de la diversité génétique dans les truffières via le choix du sexe des truffes inoculées sur les racines des arbres.
L’analyse du génome a confirmé l’absence de composés allergéniques et de mycotoxines chez ce champignon consommé depuis des millénaires. L’étude des gènes exprimés lors de la formation de la truffe a mis en évidence la forte activité des voies de biosynthèse des composés soufrés volatiles et des aldéhydes contribuant aux arômes si appréciés du « diamant noir ».
Cette connaissance des caractéristiques génétiques de la production d’arômes favorisera la sélection de souches de truffes aux qualités organoleptiques optimales et la mise au point d’outils de diagnostic permettant de guider objectivement le choix des trufficulteurs.