L'Inra et le Cirad ont organisé mardi un colloque sur les nouvelles priorités de la recherche agronomique face aux défis agricoles et alimentaires mondiaux. Dans ce cadre-là, les deux organismes de recherche ont présenté un travail de prospective «Agrimonde» entamé en 2006, qui envisage un scénario pour la mise en place de systèmes agricoles et alimentaires mondiaux «pour nourrir la planète de manière durable en 2050 et préserver les écosystèmes», indispensables au stockage de carbone, à la biodiversité, à la bioénergie, aux biomatériaux, etc. Conclusion: il sera possible de nourrir la planète au XXIe siècle, même si le défi est immense.
Cette prospective s'appuie sur l'analyse des tendances passées. «Nous serons 9 milliards en 2050», rappellent les auteurs, qui énumèrent un certain nombre de chiffres prouvant que, dans toutes les régions du monde, la capacité à produire des denrées alimentaires a fait des progrès. En 40 ans, précisent-ils, les surfaces cultivées ont augmenté de 13% et celles irriguées ont doublé. Par ailleurs, dans le même temps, la surface cultivée pour nourrir un habitant a été divisée par deux, ce qui montre que le rendement des cultures a plus que doublé (de 8.600 à 19.200 kcal/jour/hectare). La disponibilité alimentaire moyenne, note encore ce rapport, est passée de 2.500 à 3.000 kcal/jour/habitant durant ces 40 ans.
A l'horizon de 2050, «une évolution de la consommation», «un accroissement des rendements dans des proportions réalistes», des «politiques d'accompagnement» en faveur des pays en développement et «des outils politiques en matière de production et de commerce» permettront de faire face à la situation, a résumé lors d'un point de presse la présidente de l'Inra, Marion Guillou.
Le scénario «Agrimonde» suppose un alignement des consommations alimentaires moyennes par grande région du monde à 3.000 Kcal/jour/personne. Pour cela, un des premiers efforts à réaliser, porte sur «une réduction des pertes» de denrées alimentaires à tous les niveaux: production, stockage, transport, distribution, et surtout consommation, qui compte pour 10 à 30% de ces pertes.
Une autre priorité, a souligné le président du Cirad, Patrice Debré, porte sur la répartition des denrées. «Le problème de la sécurité alimentaire aujourd'hui, a-t-il dit, ce n'est pas de produire des biens mais de les répartir de manière plus équitable.»
La recherche agronomique, estiment l'Inra et le Cirad, ne sera pas suffisante. Elle doit se faire avec une implication de toute la chaîne, des agriculteurs aux consommateurs et passant par le politique. «Peser sur le local pour agir sur le global», a résumé Marion Guillou.