« Nous avons besoin d'assouplissements réglementaires pour la mise aux normes relative au bien-être du logement de nos truies », a déclaré le président de la Fédération nationale porcine (FNP), Jean-Michel Serres, dans une interview. Lors de son assemblée générale, mercredi, à Nantes (Loire-Atlantique), la FNP est aussi largement revenue sur la situation financière des élevages.
La France Agricole : Dans quelle situation financière sont les éleveurs de porcs ?
Jean-Michel Serres : Il est encore trop tôt pour parler de sortie de crise, même si la conjoncture s'est améliorée au deuxième trimestre de 2010. En 2007, les producteurs ont perdu 11 centimes d'euro par kilo, 14 centimes en 2008 et entre 2 et 3 centimes en 2009. Ils devraient rembourser en juillet la première mensualité d'avance de trésorerie perçue en mars 2008.
C'était la sixième fois que nous activions cette caisse d'avance de trésorerie, mais ce sera la première dont nous n'arriverons pas à rembourser la totalité de la somme dans les trois ans qui suivent. Cela traduit bien nos difficultés. Le cycle du porc dont nous parlions pour décrire les évolutions du marché, c'est de l'histoire ancienne. Nous ne voyons pas d'amélioration sensible des trésoreries. Les éleveurs attendent une augmentation des cours.
Le prix de l'aliment devrait progresser, et nous avons de grosses interrogations sur l'évolution de la conjoncture en fin d'année. Les pays du nord de l'Europe comme le Danemark, les Pays-Bas, ainsi que le Pologne ont modernisé et restructuré leurs ateliers et sont prêts à produire davantage.
Il est indispensable de redonner de la compétitivité aux éleveurs français en valorisant mieux la viande de porc. C'est l'objectif du travail que nous conduisons avec la démarche VPF.
Dans ces conditions, comment les producteurs vont-ils pouvoir faire face à la mise aux normes relative au bien-être du logement de leurs truies ?
Le sujet a été largement évoqué lors de notre assemblée générale, hier à Nantes (Loire-Atlantique). Je doute que nous arrivions à repousser l'échéance du 1er janvier 2013. Les pays du nord de l'Europe et le Royaume-Uni ne veulent pas en entendre parler. Et la Commission est très réticente sur le sujet. Aujourd'hui, un tiers des élevages français répondent à ces normes relative au bien-être. Cette mise aux normes est un très gros sujet d'inquiétude pour nous.
D'abord sur le plan économique, car les éleveurs n'ont pas la ressource pour investir. Nous avons obtenu un doublement de l'aide accordée par les pouvoirs publics. Elle pourra dorénavant atteindre 30.000 € par élevage avec un plafond à 200 € par truie. Mais cela ne suffira pas.
C'est pourquoi nous travaillons à la mise en place d'un fonds de développement avec des partenaires financiers et les groupements de producteurs. Ces derniers avanceront 30.000 € à leurs adhérents pour consolider leur situation. Les éleveurs seront ainsi dans une meilleure position pour aller négocier avec leur banquier. Cela a déjà été fait par le passé.
C'est aussi une inquiétude sur le plan réglementaire. Cette mise aux normes doit s'accompagner d'une modernisation de nos outils. Mais en France, il faut en moyenne deux ans pour instruire un dossier sur le installations classées. Si nous restons sur ces bases, il ne sera pas possible de tenir les délais. Rien que dans les Côtes-d'Armor, il y a 200 dossiers d'installations classées en cours d'instruction.
C'est pour cette raison que vous défendez l'amendement Le Fur sur les seuils installations classées ?
Oui. En alignant les seuils français sur ceux de nos voisins, nous éliminerons une distorsion de concurrence entre les bassins de production. Il en restera d'autres. Nous avons été très heureux de voir cet amendement voté par la commission économique de l'Assemblée nationale. Il existe un volet sur la compétitivité dans la loi de modernisation agricole. Il ne fallait pas laisser passer l'occasion.
Mais je le répète, nous ne voulons pas moins d'environnement, mais des procédures plus simples et plus rapides. En Allemagne, il faut entre six et huit mois pour obtenir le feu vert de l'Administration. En France, c'est deux ans. La démarche est longue, coûteuse et souvent source de découragement pour les producteurs.
Nous attendons maintenant de voir la position qu'adopteront les pouvoirs publics lors de l'examen de la loi par l'Assemblée. L'amendement a été adopté contre leur avis. Nous allons voir quel choix le ministre fera : celui des ONG ou celui de maintenir une production porcine en France.
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A télécharger :
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