Le verdissement des aides a été introduit dans la réforme de la Pac 2014-2020 pour relégitimer la Pac, en particulier ses aides directes. En filagrane, derrière, une volonté de conserver le budget agricole européen, régulièrement contesté. Mais pour Daniele Bianchi, membre du service juridique de la Commission européenne, l'argument ne convainc pas et le budget est toujours menacé. C'est la conviction personnelle qu'il a exprimée lors d'une « Matinagri », vendredi 19 juin, forgée en tant qu'ancien membre du cabinet de la commissaire à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel. Le réseau d'experts comptables et avocats AgirAgri avait choisi, pour la sixième édition de ses petits déjeuners-débats, « le verdissement de la Pac : mythe ou réalité ».
Une feuille de vigne qui cache des obligations minimalistes
Pour l'Italien, artisan de la réforme de 2003 et du découplage total des aides de la production, la « Pac porte en elle les éléments qui la justifient ». Il suffit de se reporter à l'article 39 du traité de Rome, fondateur de l'UE : il parle de « développement rationnel » et « d'emploi optimum des facteurs de production ». Ainsi, avec les quotas, la jachère ou la conditionnalité, le verdissement ne serait qu'une nouvelle « feuille de vigne qui cache des mesures beaucoup affaiblies au cours des négociations et porteuses de contraintes administratives que l'on veut déjà simplifier ». Or, « si le but est de légitimer les aides, des questions vont resurgir : à la prochaine occasion, certains Etats membres vont demander pourquoi payer pour des obligations déjà respectées et minimales (75 % des agriculteurs français rempliraient déjà les trois critères de verdissement : diversité des cultures, maintien des prairies permanentes et présence de surfaces d'intérêt écologique). »
Vanter plutôt une politique alimentaire
Daniele Bianchi estime que la Pac doit orienter sa communication vers « l'éducation alimentaire : apprendre à connaître les produits, leur saisonnalité, leur localisation, la qualité de la production alimentaire européenne. Je ne parle pas là des IGP, produits de niche. La qualité est ailleurs : nous avons un standard de qualité et d'hygiène très élevé ». Derrière, c'est toujours la préservation du budget agricole qui est en jeu et l'existence même d'une communauté européenne puisque l'agriculture est encore la seule politique commune. Pour mémoire, le budget Pac (55 milliards d'euros) représente la moitié du budget européen mais seulement 1 % des budgets des Etats, soit un coût d'environ 100 € par an et par contribuable. « Ces sommes sont-elles bien dépensées ? Au regard des impacts sur les consommateurs, oui », affirme le fonctionnaire européen.
Question de communication donc, mais aussi d'équité. Si les agriculteurs sont rémunérés pour assurer des standards de qualité, ils doivent tous recevoir le même paiement (sauf paiements spécifiques pour des zones à handicaps naturels évidemment). La convergence des aides introduite par la nouvelle réforme va dans ce sens. Mais en 2019, la France n'aura fait que 70 % du chemin...
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lundi 22 juin 2015 - 09h22
Ce qu'il faut expliquer à l'opinion, c'est que sans aides, 100% des exploitations font faillite (même sans aller jusque là: regardez ce qui se passe aujourd'hui: quel sera le revenu agricole de cette année: voisin de zéro!)) et qu'ils vont soit crever de faim, soit devoir doubler leur budget alimentaire, soit accepter de manger de la m. importée; en fait, ce sera tout ça à la fois.