Les exportations américaines de maïs devraient être divisées par deux cette année, selon Benoît Labouille, directeur général d'Offre et Demande Agricole, qui a fait le point sur le marché des céréales, le 21 septembre à Paris.
La campagne 2011-12 s'est caractérisée par plusieurs phénomènes climatiques avec des répercutions parfois très lourdes sur la production mondiale de grains. Tout d'abord, le mois de décembre 2011 a été marqué par l'arrivée de La Nina en Amérique du Sud et s'est soldé par une baisse de 8 Mt de la production de maïs. Ensuite, février a plongé une partie de l'Europe sous une vague de froid avec des conséquences en ce qui concerne les rendements sur la Pologne, l'Ukraine et, dans une moindre mesure, l'Allemagne et la France.
Le 15 mai marque une première hausse rapide des cours. En cause : les fondamentaux du blé d'hiver russe perturbé par la sécheresse. Une deuxième hausse plus intense s'engage à la mi-juin, faisant écho à la sécheresse qui touche les Etats-Unis (qualifiée par la suite de pire sécheresse depuis 1934).
« Nos premières estimations de production (juin) aux Etats-Unis s'établissaient aux alentours de 360 Mt ; le mois suivant, nous estimions la récolte à 310 Mt et le mois d'après, nous n'étions plus qu'à 260 Mt », explique Benoît Labouille.
Parallèlement, la sécheresse sur le bassin de la mer Noire s'est amplifiée, affectant dans un premier temps la production de blé de printemps puis celle de maïs. La sécheresse a également touché la production de maïs sur le sud de l'Europe. Le spécialiste rappelle qu'en année normale, les Etats-Unis exportent entre 40 et 50 Mt, « cette année, les exportations sont estimées à seulement 25 Mt ». Le stock de fin de campagne est estimé à 13,5 Mt, le plus faible de ces quatre dernières années.
Pour pallier la défaillance de l'origine américaine, plusieurs voies de substitution s'offrent aux importateurs, parmi lesquelles : 6 Mt de maïs brésilien, 5 Mt de blé indien, 2 Mt de blé européen, 2 Mt de sorgho. Aux Etats-Unis, le rationnement par les prix est déjà effectif, au regard des prix élevés du maïs américain par rapport à ses concurrents et aux chiffres d'exportation hebdomadaires qui sont très faibles par rapport à l'année dernière.
L'analyste estime également que le spread (écart de prix) blé-maïs aux Etats-Unis devra se réduire pour permettre un rationnement des utilisations de maïs. En 2011, l'écart de prix n'était que de 0 à 20 c$/bu ; à l'heure actuelle, le blé est plus cher de 130 à 140 c$/bu.
Au niveau de l'élevage aux Etats-Unis, les analystes ont relevé une légère décapitalisation des éleveurs de porcs. Cependant, sur les échéances d'avril-mai, le prix du porc est 40 % plus élevé que sur l'échéance d'octobre, ce qui plaide pour maintenir l'engraissement aux Etats-Unis. De plus, le gouvernement a accordé une aide à la filière de l'élevage par l'achat de 170 M$ de viande, ce qui ne va pas dans le sens du rationnement.
En ce qui concerne l'éthanol, l'analyste constate que les marges sont redevenues positives depuis le mois d'août, ce qui ne favorise pas le rationnement.
L'analyste estime que le rationnement aux Etats-Unis est bien engagé au niveau de l'exportation, mais qu'il reste faible en ce qui concerne l'alimentation animale et surtout les usages industriels (éthanol).
Visionnez l'interview de Benoît Labouille.