L'Assemblée permanente des chambres d'Agriculture (APCA) organisait mercredi un déjeuner de presse sur sa présence et son fonctionnement à Bruxelles, auprès de la Commission et du Parlement, au Copa (syndicat agricole européen) et au Cese (Conseil économique et social européen). Bref, son lobbying à l'échelon bruxellois. Lobbying, encore un gros mot dans l'Hexagone et un exercice récent pour la profession agricole. « Ce n'est pas notre culture », a avoué Jean-Louis Cazaubon, premier vice-président de l'APCA et représentant de la France à l'Assemblée européenne des réseaux ruraux.
La fin d'une ère
Sur les questions agricoles, la France a longtemps été le navire amiral, avec l'Allemagne. Le couple décidait, les autres s'alignaient. Mais l'Europe s'est élargie et le couple franco-allemand s'est distendu. La dernière réforme de la Pac a été inédite de ce point de vue. Pour la première fois, Paris a eu des moments pour le moins difficiles avec Berlin et a dû faire autant d'alliances que le règlement compte de mesures. Sans compter que la langue française est supplantée par l'anglais et que les Français sont connus pour être peu polyglottes...
Surtout, depuis les dernières élections au Parlement européen (PE) et le renouvellement de la Commission en 2014, « la France a clairement perdu de l'influence, constate sans ambages Guy Vasseur, président de l'APCA. Elle n'a plus qu'un seul chef de cabinet, deux adjoints et deux porte-parole à la Commission. Et au PE, elle a perdu des présidences ». Un positionnement national affaibli qui laisse une place au lobby professionnel. « Notre objectif est de travailler encore plus fort avec les deux principaux groupes politiques du PE, d'alimenter en permanence les eurodéputés français et les rapporteurs (quelle que soit leur nationalité) sur les sujets agricoles (Pac, fin des quotas laitiers, bio, TTIP...), a-t-il souligné. Il nous faut aussi travailler davantage avec notre propre gouvernement pour essayer de porter des positions communes ».
Une Commission européenne plus politique
« Sur l'écriture des futures mesures de la Pac par exemple, nous devons anticiper bien plus que nous ne l'avons fait jusqu'ici », a illustré Claude Cochonneau, vice-président de l'APCA et président de la commission de l'économie. Aussitôt dit, aussitôt fait : « Nous venons d'engager un travail avec d'autres pays européens qui pourraient être impactés par la Pac ou la fin des quotas laitiers de la même façon que nous, pour faire des propositions communes. » L'APCA se veut plus offensive.
Un réveil européen qui trouve aussi son explication dans la constitution de la nouvelle Commission. « Elle est politiquement plus forte, elle porte de vraies orientations, s'est félicité Guy Vasseur. Elle ne se laisse plus dicter les règles par ses services administratifs. C'est comme si les services du ministère de l'Agriculture disaient à Stéphane Le Foll ce qu'il devait faire... N'y voyez aucune allusion désagréable, a-t-il ironisé. Nous avons l'expérience d'une administration qui affirme que telle ou telle proposition n'est pas applicable alors que le politique peut trouver des solutions. » L'APCA voit dans cette Commission plus politique, une occasion de « taper dans un tabou » en remettant sur la table des négociations le développement du système assurantiel et les paiements contracycliques.