Selon une analyse du Centre d'études et de prospective du ministère de l'Agriculture, d'après une étude sur le marché des engrais réalisée par le cabinet GCL Développement durable et publiée le 15 avril, la période de transition que traverse actuellement l’industrie des engrais est source de fortes incertitudes, avec des répercussions possibles sur le prix des intrants pour l’agriculture française.
L'analyse estime que le déplacement de la demande mondiale en engrais, la valorisation des pays et acteurs industriels disposant de ressources naturelles ainsi que le renforcement de politiques environnementales (système du marché européen des quotas carbone pour la production d’ammoniaque et d’acide nitrique à partir de 2013, directive nitrates...) pourraient aboutir à une disparition progressive de l’industrie des engrais française au profit de plates-formes logistiques, engendrant une exposition plus importante aux fluctuations des prix mondiaux.
Afin d’assurer un prix compétitif et d’optimiser la chaîne de fabrication, explique l'auteur de cette analyse, la production d’engrais minéraux s’oriente vers une délocalisation à destination des pays ressources dont l’influence devrait se renforcer à l’avenir : « Ce seront les pays producteurs fortement exportateurs (le Maroc, le Moyen-Orient, Trinidad et Tobago pour l’azote et le phosphate, le Canada, la Russie et la Biélorussie pour le potassium) qui pèseront sur le marché des engrais demain. »
D’après l’étude, les outils de mélange dans lesquels les coopératives ont « fortement investi » pour fabriquer leurs propres engrais composés devraient continuer à se renforcer compte tenu de la délocalisation des unités industrielles dans les pays disposant des matières premières de base. Cette tendance devrait conforter l’influence grandissante des traders-négociants en tant qu’intermédiaires, estime la note.
L'industrie des engrais en France qui « semble remplir un rôle de modérateur des prix et est à l’origine d’innovations industrielles », estime l'auteur. Son salut, selon lui, pourrait passer par une « bonne maîtrise des techniques culturales et une recherche agronomique de haut niveau » pour réduire les impacts environnementaux liés à la fertilisation.
Il faut « assurer la sécurité et la qualité de l’approvisionnement » en engrais, martèle l'analyse. « Cela pourrait passer par le maintien de grands groupes industriels sur le territoire national ou européen, ainsi que par le renforcement de grandes coopératives d’approvisionnement, faisant jouer la concurrence sur le marché mondial et passant des contrats à moyen terme avec les producteurs d’engrais ».