L'Autorité de la concurrence française a jeté un pavé dans la mare le jeudi 18 avril 2013 en préconisant la disparition graduelle des tarifs réglementés du gaz pour mettre fin à un système qui, selon elle, a contribué depuis des années à faire payer plus cher les consommateurs de l'Hexagone.
Dans un avis adressé au gouvernement, l'institution met en lumière les nombreuses défaillances du modèle en vigueur de réglementation des tarifs, en dépit des récentes modifications apportées par le gouvernement.
Elle se montre catégorique : ce système a conduit à avoir « une influence défavorable » sur la concurrence sans « contribuer positivement » au pouvoir d'achat des ménages. L'Autorité ne voit pas d'autre issue que de trancher dans le vif, en procédant à une « suppression, par étapes, de manière à permettre le développement d'offres plus compétitives, au bénéfice des consommateurs ».
Six ans après l'ouverture à la concurrence, près de 90 % des Français restent clients d'EDF en d'électricité et de GDF Suez en gaz, montrant la difficulté des opérateurs alternatifs (Direct Energie, Eni, etc.) à séduire les particuliers face aux fournisseurs historiques.
En ce qui concerne le gaz, la concurrence est plus forte sur le marché des entreprises. Mais, pour l'Autorité de la concurrence, l'ouverture du marché de détail du gaz naturel s'est, elle, avérée « un échec ».
Dans un document très détaillé, l'Autorité commence par reconnaître, malgré tout, les améliorations permises par la réforme des tarifs du gaz annoncée à la fin de 2012 par l'exécutif, qui a conduit à trois baisses depuis de début de l'année.
Cette réforme était partie du constat que les prix de marché se sont avérés, ces dernières années, souvent plus favorables pour le consommateur que les tarifs des contrats à long terme (indexés sur le pétrole), avec pour mesure phare une révision des prix tous les mois et non plus chaque trimestre. Elle a également instauré, dans les formules de calcul, des prix des facteurs d'évolution en principe plus favorables aux consommateurs. Il reste que, depuis février, les trois baisses annoncées sont restées modestes face à la flambée des prix du gaz depuis deux ans.
Alors que les fournisseurs alternatifs de gaz ont été « dissuadés » d'entrer sur le marché, les consommateurs – particuliers comme professionnels – se sont retrouvés confrontés à « une information défaillante », avec une absence de visibilité sur les nouveaux acteurs.
Pour preuve, avance l'institution, « plus de la moitié des consommateurs résidentiels ne savent pas qu'ils peuvent choisir leur fournisseur de gaz naturel et 68 % d'entre eux ignorent qu'EDF et GDF Suez sont deux entreprises différentes et concurrentes ». Au final, ils se sont retrouvés empêchés de se tourner vers les fournisseurs alternatifs existants, dont les tarifs peuvent s'avérer « jusqu'à -15% » inférieurs à ceux pratiqués par l'opérateur historique.
Dernier argument, et non le moindre, l'Autorité de la concurrence explique que le prix payé par les consommateurs français est en moyenne, et de façon constante, « très nettement au-dessus de la moyenne européenne » depuis 2009. Les tarifs sont également supérieurs à ceux de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne, où ils ne sont pas réglementés.
Ce faisceau d'éléments a convaincu l'institution d'appeler le gouvernement à « établir une feuille de route » visant à supprimer, « étape par étape », ces tarifs, en commençant par ceux applicables aux grandes industries.