La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a organisé le mercredi 9 octobre 2013 une table-ronde sur les abattoirs. L'abattage de proximité, en lien avec les circuits courts, et l'abattage rituel se sont taillés la part du lion lors des débats entre les parlementaires et les professionnels de la filière venus répondre à leurs questions. Les uns ne comprenant pas toujours les contraintes ou les arguments des autres.
Si les députés intègrent bien les difficultés de l'élevage en France et des problèmes posés aux industriels par le recul de l'offre en animaux vivants, ils se posent aussi la question de l'aménagement du territoire et de l'emploi dans leurs circonscriptions. « La disparition des abattoirs locaux est un frein au développement de l'élevage, considère Germinal Peiro, député socialiste. Quels partenariats entre privé et public pour maintenir ces abattoirs, pour mailler le territoire ? »
D'autres, comme Brigitte Allain, élue écologiste, s'interroge sur l'opportunité de rapprocher les abattoirs des bassins de production « pour des raisons de bien-être animal et de coût de transport ». Est aussi posée la question de la consommation de proximité. « Dans ma circonscription, un opérateur a décidé de spécialiser un abattoir sur une espèce, relate Jeanine Dubié, élue des Hautes-Pyrénées. Les éleveurs sont obligés d'aller faire abattre à plusieurs centaines de kilomètres. Cela pose problème pour les circuits courts. »
Les professionnels « n'ont rien contre les circuits courts, assure Dominique Langlois, le président d'Interbev. Mais si on ne fait que ça, l'industrie de l'abattage n'existera plus. Heureusement qu'on abat des charolais en Bretagne. » Philippe Dumas, président du groupe coopératif Sicarev, lui emboîte le pas. Il explique que les industriels n'arrivent plus à saturer leurs outils pour écraser leurs charges fixes. Et que cela explique les mouvements de concentration et de spécialisation. « Les partenariats sont possibles, assure-t-il. Mais il faut être réaliste. On ne mettra pas un abattoir dans tous les cantons. »
Les députés ont aussi remis sur le tapis l'idée d'étiqueter la viande en fonction de son mode d'abattage. Cette idée est aussi largement défendue dans un rapport élaboré par une mission sénatoriale et rendu public cet été. « Je crois qu'on doit informer le consommateur, lance Daniel Fasquelle, élu UMP du Pas-de-Calais. S'il y a eu des campagnes [contre l'abattage rituel, NDLR], c'est parce qu'il y a un manque de transparence. »
Les professionnels sont unanimes. Ils ne veulent pas étiqueter les viandes en fonction du mode d'abattage. « Aller vers l'étiquetage, c'est stigmatiser des cultes et se couper de 95 % des exportations », prévient Dominique Langlois. Le président d'Interbev fait au passage une mise au point en rappelant aux députés qu'il faut parler d'abattage rituel dans sa globalité, et que ce mode d'abattage est très encadré. « Le déséquilibre que nous avons [en matière de débouchés, NDLR], n'est pas sur le halal mais sur le casher, car les israélites ne consomment pas les avants », précise-t-il.
Philippe Dumas enfonce le clou, en soulignant qu'il « n'imagine pas mentionner le mode d'abattage sur les étiquettes alors qu'on n'étiquette pas l'origine des viandes sur les produits transformés, insiste-t-il. Je ne l'imagine même pas ! On ne fait pas du rituel pour le plaisir. Cela représente un surcoût. Quand on rentre un bovin, on a des pièces à valoriser. Les abats et certains sous-produits ne trouvent de valorisation que sur ces marchés. »
Visionnez la vidéo de la table-ronde.