Les agriculteurs ont prévu une démonstration de force jeudi et promettent de bloquer Paris avec « plus de 1.000 tracteurs » pour exprimer leur désespoir face à l'effondrement des cours et demander des réformes de fond.
Cette manifestation, à l'appel de la FNSEA et des JA (Jeunes Agriculteurs), reflète le malaise exprimé cet été par les éleveurs français (lait, viande bovine et porcine) qui ont vu les prix de leurs productions chuter au point de mettre en danger leurs exploitations. Les quinze premiers tracteurs sont partis mardi de la pointe Saint-Mathieu, site emblématique du Finistère.
La FNSEA et les JA ont lancé un appel à la mobilisation des paysans, issus de toutes les productions, à venir manifester le 3 septembre à Paris, après environ 500 actions menées tout l'été à travers le territoire, rappellent les deux organisations. Une délégation d'une centaine d'agriculteurs se rendra par ailleurs jeudi matin à l'Assemblée nationale pour remettre aux députés les « demandes et doléances d'un monde paysan, d'un monde rural au bord de l'explosion et qui attend beaucoup de ses représentants nationaux », écrivent mardi les deux présidents, Xavier Beulin (FNSEA) et Thomas Diemer (JA), dans un courrier adressé aux députés.
Toute l'agriculture française sera donc représentée, des céréaliers aux planteurs de betteraves, confrontés à la chute des prix du sucre dans l'Union, mais les éleveurs comptent particulièrement profiter de ce rassemblement pour se faire entendre. « Nous espérons des résultats. Nous n'allons pas à la parade faire le 14 juillet des tracteurs », a averti Sébastien Louzaouen, président des Jeunes Agriculteurs du Finistère, département d'où une délégation est partie dès mardi pour rejoindre la capitale. « On est à bout », poursuit le producteur de lait. « Si on montre qu'on peut bloquer Paris, ça fera peut-être bouger le gouvernement. Désolé pour les Parisiens, mais les paysans arrivent ». Trois convois convergeront vers Paris, précise la FNSEA.
Le syndicat réclame du concret pour que l'agriculture française ne « parte pas en liquidation ». « Au-delà de l'urgence, nous voulons une véritable ambition pour l'agriculture française, pas une solution miracle mais un ensemble de décisions courageuses pour sortir les paysans du marasme », insiste-t-il, jugeant que le plan de soutien à l'élevage présenté par le gouvernement « est insuffisant ».
Une « pause » dans l'empilement
Le gouvernement a annoncé le 22 juillet un plan d'urgence pour les éleveurs de 600 millions d'euros, dont 100 millions immédiatement disponibles et 500 millions sous forme de garanties de prêts pour les exploitants surendettés. Mais le monde agricole, au-delà de mesures de court terme pour faire face aux trésoreries exsangues, réclame aussi une « pause » dans l'empilement réglementaire et normatif qui plombe les producteurs français au profit de leurs concurrents européens. Xavier Beulin souhaite un moratoire d'un an sur toute nouvelle disposition réglementaire. « Quand la France va au-delà de la norme européenne, il est temps de se poser les bonnes questions », répète-t-il.
Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, a déjà indiqué que « des annonces ser[aie]nt faites le 3 septembre », sans plus de détails. Mais il souligne aussi que la crise est liée à un excédent de production sur le marché européen dû à l'embargo russe, pour le porc, ou à un excédent mondial, pour le lait, et qu'il faut donc agir au niveau communautaire. M. Le Foll a d'ailleurs demandé la réunion d'un conseil européen extraordinaire des ministres de l'Agriculture le 7 septembre. La FNSEA a déjà prévu une autre mobilisation ce jour-là à Bruxelles.
La Confédération paysanne y sera aussi, mais elle a refusé de s'associer aux mouvements des syndicats majoritaires et organisera ses propres actions en régions.
Par ailleurs, la société de fret ferroviaire Combiwest, créée par des agriculteurs bretons pour transporter leurs produits, a indiqué mardi qu'elle renonçait à bloquer le trafic des trains en Région parisienne jeudi pour protester contre les entraves à son développement.