La Chine va mener à titre expérimental un programme inédit autorisant des ventes de terrains en zones rurales, alors que ces dernières relèvent toujours d'un monopole d'Etat, attisant les tensions dans les campagnes, a indiqué un haut responsable le 4 mars.
Pékin s'était dit prêt, à la fin 2013, à autoriser les résidents ruraux à revendre leurs « droits sur leurs terres » afin d'encourager des millions d'agriculteurs à quitter les campagnes pour les villes, l'urbanisation étant vue comme un vecteur de croissance économique.
Une promesse qui va commencer à prendre forme : 33 districts vont suspendre certaines dispositions interdisant les libres transactions sur des terres non agricoles, a annoncé mercredi Mme Fu Ying, porte-parole de l'Assemblée nationale populaire (ANP), chambre d'enregistrement législative du régime. Parmi les zones concernées figurera le district de Daxing dépendant de la municipalité de Pékin, là où la capitale chinoise prévoit justement d'édifier son nouvel aéroport international.
Le programme expérimental permettra d'échanger librement sur le marché « des terrains situés en zone rurales et destinés à des fins commerciales », selon un communiqué posté sur le site de l'ANP. En clair, cela signifie que les ruraux occupant ces terrains pourront les céder à qui ils veulent et non plus contraints de les vendre seulement au gouvernement.
Mécontentement populaire et violences
Dans la loi chinoise actuelle, toutes les terres appartiennent en dernier ressort à l'Etat et aux collectivités, les agriculteurs n'en possédant que la jouissance d'usage. Les cadres locaux peuvent réquisitionner de force ces terres, contre une compensation souvent dérisoire avant de les céder avec bénéfices à des promoteurs - la principale source de revenus pour les gouvernements locaux. Une pratique qui nourrit des vagues régulières de mécontentement populaire et de violences.
« Cette réforme appuiera le développement d'une agriculture moderne et l'urbanisation, et elle protégera mieux les droits et intérêts des agriculteurs », a assuré Mme Fu lors d'une conférence de presse.
L'expérimentation pourrait certes accroître les revenus des familles rurales et réduire les affrontements entre agriculteurs et gouvernements locaux, observe Wang Cailiang, directeur de la firme juridique pékinoise Beijing Cailiang. « Mais il faudra attendre pour en juger les effets. Tout dépendra de qui sera aux manettes pour décider des transactions : si ce sont les officiels locaux ou les groupes immobiliers plutôt que les agriculteurs eux-mêmes, alors cette libéralisation risque d'être un pas en arrière », a-t-il déclaré à l'AFP.