Des pays du Maghreb, inquiets d'une contagion de la révolution tunisienne, achètent en masse des céréales pour éviter d'éventuelles émeutes de la faim, au risque d'accroître encore davantage les prix des produits alimentaires sur le marché mondial.
« On constate une forte accélération des achats de céréales et d'huile des pays du Maghreb : Maroc, Libye, Algérie et aussi du Soudan », affirme Michel Portier, directeur du cabinet de conseils spécialisé Agritel.
Ces achats portent essentiellement sur des produits alimentaires de base comme le blé, le maïs, les oléagineux ou l'orge.
L'Algérie, secouée par cinq jours d'émeutes contre la vie chère au début de janvier, a acheté environ 1 million de tonnes de blé en quinze jours. Mardi, Alger a notamment passé commande de 600.000 tonnes de blé.
Alger a aussi décidé d'augmenter sensiblement le quota de blé tendre fourni à chaque minoterie « en vue de contenir les spéculations apparues sur la farine depuis le mois de janvier », selon l'agence de presse algérienne APS.
La Libye a pour sa part acheté 100.000 tonnes de blé sur le marché international.
Le Maroc a également lancé le 12 janvier 2011 un appel d'offres portant sur l'achat d'environ 255.000 tonnes de céréales, dont 154.500 tonnes de blé et 100.000 tonnes d'orge.
Les volumes de céréales vendus par la France aux pays du Maghreb ont fortement progressé depuis le début de la campagne, en l'absence des exportateurs de la mer Noire.
La Libye a, par exemple, acheté presque autant de blé français que lors des deux dernières campagnes réunies, tandis que l'Egypte a déjà réceptionné 700.000 tonnes de plus de blé français cette année que lors de la campagne précédente à la même époque, selon FranceAgriMer.
« On ne sera pas surpris de les revoir ces jours-ci aux achats à la suite des événements de la Tunisie pour sécuriser leurs approvisionnements alimentaires et contrôler l'inflation en produits alimentaires de base », selon Michel Portier.
Comme dans la plupart des pays en développement, l'alimentation représente entre 60 et 80 % du budget des ménages dans le Maghreb.
Cette ruée des pays de l'Afrique du Nord vers les produits agricoles risque d'affecter des stocks européens déjà serrés, redoutent les analystes.
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