L'organisation humanitaire Oxfam appelle l'Union européenne à renoncer à ses objectifs, actuels et futurs, en matière de biocarburants, estimant qu'ils ont poussé les prix alimentaires à la hausse.
Dans un rapport publié lundi, « Les Semences de la faim », Oxfam calcule que la surface agricole affectée aux agrocarburants destinés à alimenter les voitures européennes en 2008 « aurait pu permettre de produire assez de blé et de maïs pour nourrir 127 millions de personnes pendant un an ».
« A elle seule, la politique européenne (adoptée en 2008) de soutien aux agrocarburants sera responsable d'une hausse de 36 % des prix alimentaires d'ici à 2020 », indique Clara Jamart, responsable des questions agricoles et de sécurité alimentaire chez Oxfam France.
En 2008, l'UE s'est accordée sur un objectif d'incorporation de 10 % de biocarburants de première génération à l'horizon de 2020. Elle en est à 4,5 % en moyenne aujourd'hui (7 % pour la France).
Les 27 pays membres de l'UE entament, ce lundi, les discussions pour la phase suivante, au-delà de 2020, qu'Oxfam souhaite voir abandonnée en même temps que les objectifs de 2008, alors que les prix mondiaux des céréales flambent depuis cet été.
« La demande croissante en agrocarburants, soutenue à des niveaux artificiellement élevés par les politiques européennes, constitue également le principal moteur de l'accaparement des terres dans les pays du Sud », écrit l'organisation.
Citant la Coalition internationale pour l'accès à la terre, elle estime que ce sont « près de deux tiers des terres accaparées entre 2000 et 2010 qui seraient utilisées pour produire des agrocarburants », essentiellement à partir d'oléagineux (colza, huile de palme, tournesol et jatropha) et de céréales (maïs notamment), de soja, de canne ou de betterave à sucre.
« Les objectifs d'incorporation de l'UE ont un impact particulier sur le cours mondial de l'huile végétale et des oléagineux », puisqu'elle leur consacre 65 % de sa production d'huiles végétales, souligne Oxfam. « Cela entraîne une augmentation du prix à la consommation de l'huile de cuisson dans les pays importateurs comme Haïti ».
Enfin, « la politique européenne de soutien aux agrocarburants ne permet pas de réduire le changement climatique ». Elle l'aggrave même « si on intègre les émissions de gaz à effet de serre liées à leur production, dont celles dégagées par le changement d'affectation des sols, comme la déforestation ».